Comment l'hydroptère a-t-il pu battre tous les records de vitesse des voiliers?
L'hydroptère détenteur du record de vitesse des voiliers est celui d’Alain Thébault, et ne doit son succès ni à une chance soudaine, ni au hasard, ni à une météo subitement favorable. Son record résulte d'un calcul de dimensions, d'orientation de voilure et de matériaux, qui se réglèrent, se choisirent et s'affinèrent au fil d'essais, et souvent des destructions de bateau. En effet, si l'hydroptère parvient aujourd'hui à gérer l'incroyable résistance que lui opposent le vent et la mer, c'est grâce à de nombreux essais, preuve s'il en fallait que ce bateau n'a pas été inventé subitement, ou ses proportions idéales devinées du premier coup. Cette partie passera en revue tous les aspects de l’hydroptère qui lui ont permis de gagner de la vitesse.
► Arrêtons-nous dans un premier temps sur le poids du voilier et les matériaux utilisés dans sa conception. Le carbone, matériau prisé pour sa légèreté et sa solidité relatives aux autres matériaux, constitue la majorité du bateau. Son envergure a été repensée, et les flotteurs sont liés à la coque centrale de manière solide et offrant le moins possible de prise au vent.
Son envergure est de 24 mètres, et il mesure 18 mètres de long, néanmoins des dimensions moins équilibrées auraient certes offert un meilleur profil, mais également de plus grands risques de déviation, freinage ou de retournement de l'hydroptère par le vent. Le poids du carbone est également un avantage, car il est suffisant pour permettre, lorsque le bateau a décollé, une stabilité relative confortée par la présence des flotteurs, mais également assez léger pour ne pas empêcher la coque centrale de se dés-immerger.
Dans la partie I.2 sont rappelées les forces de frottement de l’eau sur le bateau, et il est dit que la construction du bateau doit être faite en prenant en compte ces frottements, afin de les minimiser.
L’utilisation de carbone dans la grande majorité de l’hydroptère est donc un choix réfléchi, qui doit permettre au bateau d’allier solidité extrême et le plus de légèreté possible.
Surface des voiles de l'hydroptère :
Grand-voile: 165 m²
►Grand-voile 1ris: 138.5 m²
►Grand-voile 2ris: 110 m²
Surface du génaker: 184 m²
Surface du Solent: 94 m²
► Examinons les flotteurs. Comme sur tout trimaran, une de leurs fonctions premières est d'assurer une quasi-complète stabilité à la coque principale; ce n'est toutefois pas la seule utilité importante des flotteurs de l'hydroptère. Leur fonction est également de maintenir les plans porteurs en « V » de chaque côté du bateau afin qu'ils soient solidaires du reste du voilier et puissent s'orienter aussi fluidement que possible.
La présence des « passerelles » entre flotteurs et coque principale est donc presque exclusivement destinée à soutenir les foils en « V ». Elles doivent être assez légères pour ne pas déséquilibrer le bateau lorsqu'il décolle [tirant d'eau] lorsqu'il arrête de gîter, mais également assez solides pour permettre au bateau de résister à la force de pression de l'eau considérable, qui sans cette solidarité disloquerait le bateau, le retournant ou déchirant un des bras du voilier.
►L’hydroptère nécessite un équipage précis pour fonctionner dans son optique de record de vitesse. Cet équipage doit comporter suffisamment de personnes pour pouvoir régler la plupart des problèmes bénins qui pourraient survenir pendant une traversée, mais également être suffisamment peu nombreux pour ne pas trop alourdir le bateau par son nombre de personnes. L’hydroptère a un équipage de 8 personnes, nombre qu’il conserve depuis 2009.
► Une autre technologie nautique de pointe mise en exergue par l'hydroptère est la disposition des foils. Ils sont placés de manière originale (cf. ci-dessus). Ils sont placés de manière originale (cf. ci-dessus).
Les foils de l'hydroptère 1,0 ont été remplacés par des pièces de métal plus larges avec l’hydroptère.ch, qui sont plus utiles car plus aisées à déplacer en fonction des étapes de « décollage » de l'appareil. Ces plans porteurs sont de deux natures différentes, en ‘’V’’ et en ’’T’’, est les uns pallient les inconvénients des autres, et vice-versa. En effet, l’observation d’une vidéo de l’hydroptère « décollant » permet de constater que le foil en « T » permet une stabilité plus grande que celle qu’apporteraient les deux foils en « V », et la présence des foils en V permet une minimisation de la destruction en cas
d’avarie, car ils sont plus faciles à rétracter, et donc à protéger. (cf. schéma de droite, représentant l'hydroptère sur mer calme, avec les foils en V (présentés en orange) repliés)
Foils en V (orange) repliés
► La jonction mécanique au-dessus du plan porteur en « T », a un poids important, qui est toutefois en partie compensée grâce aux foils en « V » : en effet, le poids de tout l’hydroptère, au lieu d’être concentré sur ce foil « central » du bateau, est réparti sur celui-là et sur les plans porteurs en « V », qui sont plus longs et permettent au bateau de prendre une vitesse de pointe supérieure à celle des autres bateaux dotés de plans porteurs « conventionnels ».
► Le plan porteur en "T" est assez petit sur l’hydroptère, en effet, il constitue une sorte de dérive pour le bateau. Que ce dernier soit immergé ou qu'il ait décollé, sa surface est identique. Il est également appelé "empennage" du bateau (confer figure ci-contre, représentant - à l'envers- le foil en "T" de l'hydroptère). Le plan porteur "T" de l'hydroptère a un régulateur d'angle d'incidence, c'est-à-dire qu'il peut s'orienter pour faire face à différents types de sollicitation du bateau: en cas d'accélération, de maintien de la vitesse, de décéleration... Cet angle variable lui permet d'être plus fluide par rapport aux moments de navigation de l'hydroptère. S'il n'en était pas équipé, l'hydroptère pourrait chavirer, ou tomber de côté lorsqu'il perd de sa vitesse.
► L’écrêteur est l’autre technologie « de pointe » dont dispose l’hydroptère, en ce qui concerne son profil de rapidité. Son autre nom est ‘’amortisseur d’efforts’’, et il a été inventé par André Sournat. Sur la photo, l’écrêteur est le vélin hydraulique encadré en marron, à côté d’Alain Thébault.
Comme expliqué plus haut, l’hydroptère est un bateau porté par la pression dynamique de l’eau sur ses foils (la dépression s’effectue au-dessus de ces foils, et il y a suppression sur le dessous de ces mêmes foils). Ces derniers subissent donc une pression très importante (confer plus haut, d’où l’importance d’une construction en carbone). L’écrêteur est là pour limiter cette pression sur les foils.
L’écrêteur agit en permettant au foil de s’incliner légèrement lorsque la valeur de portance dépasse la limite fixée par l’équipage ; cette méthode permet de repousser les limites de la pression que sont capables de supporter les deux plans porteurs en « V ».
Conclusion: Fort de ces améliorations et équilibré aussi bien dans ses matériaux que dans sa voilure, l’Hydroptère d’Alain Thébault est au jour d’aujourd’hui le bateau à voile le plus rapide du monde. Nous pouvons conclure que cette vitesse est due à des innovations techniques, des proportions bien choisies et des matériaux adaptés.
Notes :
-l’Hydroptère dont parle cette partie est bien « L’hydroptère » d’Alain Thébault (y compris les mesures de sa longueur, de son poids et de ses voiles) . La seule référence à l’hydroptère.ch - un prototype d’hydroptère réalisé par quelques ingénieurs en vue de réaliser un Hydroptère Maxi – est faite lorsqu’on parle du « repliage » des foils en V.